Acclimatation sur les rives du salar d’Aguas Calientes

Vous avez été nombreux à avoir aimé notre compte rendu de l’ascension du volcan Villarrica le mois dernier. Voici maintenant l’épopée de notre acclimatation à 4000 mètres du côté du salar d’Aguas Calientes. Au programme, et pas dans l’ordre, un camion citerne, des lignes droites interminables, un camping car, des beaux yeux, des rencontres humaines et canines, un vent glacial et comme toujours des paysages à vous couper le souffle. Bonne lecture !

Dimanche 5 Juin : San Pedro de Atacama – Camar
Distance : 69 km

Coordonnées GPS bivouac : S 23.406671 W 67.961361

Jour J, nous partons en direction du Paso Sico, au programme de cette sortie d’acclimatation, montée à 4500 mètres et 250 kilomètres aller-retour. Nous avions prévu de partir la veille, mais Fabio n’étant pas dans sa forme habituelle nous avons préféré patienter un jour de plus.

Les premiers kilomètres se font le long du Salar d’Atacama, qui n’est pas si blanc que sur la carte ! Les lignes droites sont interminables, parfois de plus de dix kilomètres ! Le volcan Licancabur, point culminant des environs, s’efface petit à petit derrière nous.

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Nous passons devant le poste de contrôle de l’Atacama Large Milimeter Array, le plus grand radiotélescope au monde (pour faire simple), où nous en profitons pour prendre quelques informations pour une éventuelle visite. Celle-ci ce peut se faire uniquement en bus depuis San Pedro de Atacama, interdit donc de monter en vélo. La visite porte uniquement sur le « village des scientifiques » et ne comprend pas la visite du plateau à 5200m où sont localisées les 66 antennes d’écoute des étoiles. Plus tard nous nous rendrons compte que les listes d’attentes pour cette visite sont complètes plusieurs mois à l’avance.

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Arrivés à Toconao, nous croisons un cyclotouriste Américain qui était en même temps que nous à El Chalten, à la casa de ciclista de Flore. Il vient de traverser les 200 kilomètres du Salar d’Atacama depuis la ville côtière d’Antofagasta. Une belle performance !

Pendant que nous mangeons un morceau, nous rencontrons un couple de Français avec leurs deux garçons qui viennent de s’installer à San Pedro pour démarrer une activité de vols en Montgolfière. Ex-cyclotouristes, ils nous proposent de nous héberger à notre retour.

C’est nos ventres bien remplis avec une bonne salade (et sans faire de sieste) que nous continuons sur ces grandes étendues désolées en direction de Socaire. Parfois une oasis se révèle et nous traversons une petite forêt. En milieu d’après-midi nous bifurquons pour le petit village de Camar. Il reste encore trente kilomètres avec sept cents mètres de dénivelé pour rejoindre Socaire, trop pour cette première journée de remise en jambes. En plus, le ciel commence à se couvrir.

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Arrivés à Camar après une interminable montée, un habitant nous propose une de ses terrasses de maïs pour planter la tente. A notre grande surprise, l’eau coule à flot par ici, des canaux irriguent les différentes terrasses cultivées ! Nous sommes à 2700 mètres et la nuit sera fraîche !

Lundi 6 Juin : Camar – Socaire
Distance : 31 km

Coordonnées GPS grange : S 23.589900 W 67.890636

Le soleil se lève doucement alors que nous rangeons le campement. La lumière inonde petit à petit le Salar d’Atacama qui s’étend à perte de vue ! Notre hôte nous offre un peu d’eau et nous reprenons la route ! La montée bien raide d’hier soir est maintenant une superbe descente avec vue imprenable sur le Salar. Ce qui nous aura pris une heure la veille ne nous occupe que cinq minutes !

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Nous voici à nouveau sur la route principale et ses grandes lignes droites. Quinze kilomètres sont encore à parcourir avant d’attaquer la montée vers Socaire.

Seize kilomètres et sept cents mètres de dénivelé plus tard, nous voici dans le dernier village avant les hauts plateaux et les lagunes !

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De nouveau, l’eau est contrôlée et se déverse de « piscines » en canaux jusqu’aux zones où poussent l’été du maïs, entre autre.

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Nous nous restaurons dans une « cocineria » à l’entrée de la ville, pour 3500 Pesos. Nous décidons de rester ici pour la nuit et de continuer l’ascension le lendemain. L’auberge ici est à 10 000 Pesos, un peu trop cher pour nous ! Nous nous dirigeons vers la place du village où nous avons connaissance d’une auberge plus économique. Nous trouvons les lieux mais malheureusement il n’y a plus de lit disponible. Un groupe d’ouvriers travaillant sur la construction d’un bâtiment occupe toute l’auberge ! Danilo, le propriétaire hyper actif, nous montre donc une pièce poussiéreuse, avec quelques matelas au sol. Parfait pour nous ! Et le prix ? « Voyons Danilo, nous n’allons pas payer pour ça, n’est-ce pas ? » Marché conclu, on dînera à sa « cocineria » Ricon del Viento (traduisez le Coin au vent), mais on ne payera pas la nuitée dans notre résidence cinq étoiles !

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Pendant que Fabio sieste, Julien en profite pour se balader sur les hauteurs de Socaire. Le contraste entre les maisons faites de bric et de broc, et le stade de football flambant neuf est saisissant ! D’ailleurs, c’est toute la ville qui est en chantier. Dès la sortie du village, la végétation est semblable à celle de la pampa, avec beaucoup de petits buissons épineux comme le « Rica Rica » que nous avions déjà pu savourer dans une bière locale à San Pedro.

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Julien rejoint le canyon sensé alimenter Socaire en eau : il est à sec ! De superbes formations rocheuses l’attirent et le voilà rapidement au fond du canyon ! Il rejoint donc le village en suivant le lit de la rivière, et comprend à l’approche des maisons que la rivière n’est pas à sec, mais détournée. Un peu plus en amont c’est la totalité de l’eau qui est forcée dans un gros tuyau pour alimenter la ville en contrebas.

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Le soir, le dîner en compagnie des travailleurs est simple mais efficace. Elisa en cuisine s’est démenée toute l’après-midi pour faire manger tout ce petit monde ! Nous découvrons qu’il y a du wifi et pouvons ainsi communiquer sur notre trouvaille du jour et prendre quelques nouvelles de la maison.

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Mardi 7 Juin : Socaire – Salar de Agua Caliente
Distance : 66 km

Quantité d'eau embarquée : 11 litres

Coordonnées GPS bivouac : S 23.924886 W 67.662048

Danilo s’est levé à cinq heures pour préparer le pain. A Sept heures et demie, lorsque nous venons prendre le petit déjeuner, il est tout fier de nous le faire goûter, il est encore tout chaud ! Nous prenons des forces, la journée va être rude. La route grimpe dès la sortie du village, et nous sommes accompagnés par un couple de bergers Allemands. Ils nous suivront sur près de vingt-cinq kilomètres de montée !

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Lorsque nous arrivons finalement à les laisser derrière dans une descente nous ne pouvons qu’espérer qu’ils parviennent bien à rentrer jusqu’à Socaire.

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Vers 3800 mètres nous déjeunons à l’abri de quelques rochers. Il ne fait déjà pas très chaud avec ce vent froid qui est de plus en plus fort ! Malgré le vent dans le dos nous avançons à faible allure, la pente n’est pas très forte heureusement. Bientôt le goudron laisse place au gravier.

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Le col à 4100 mètres est superbe, nous avons maintenant vue sur le haut plateau qui s’étend au pied du Cerro Miniques. Plus loin, le ripio n’est pas trop mauvais, seules quelques portions sont vraiment difficiles à rouler.

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Le seul véhicule que nous croisons est un camion d’eau potable de retour de livraison au poste frontière. Il nous permet de remplir nos poches à eau, quatre litres sur les douze mille du camion-citerne ! Plus loin, une ligne à haute tension gâche un peu le paysage, Julien pensif se demande alors si le Chili importe de l’électricité de l’Argentine ou l’inverse ?

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Arrivés au Salar d’Aguas Calientes, il est gelé ! Nous qui pensions nous détendre dans ses eaux chaudes… Rapidement, nous trouvons l’abri indiqué par le site andesbybike.com. Il y a là un « camper » avec à son bord un couple de « Chileno Argentin ». Très accueillants, ils nous proposent de venir plus tard manger à l’intérieur, avec plaisir !

Nous plantons la tente alors que le soleil se couche sur les sommets à 5900 mètres. Le vent glacial souffle fort, heureusement que cet abri en forme de U nous protège un peu.

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Nous nous réfugions à l’intérieur du camping-car pour partager le repas. Sophia est professeur de Yoga et de danse, son ami est guide à San Pedro et parle un français impeccable. Ils reconnaissent une nouvelle route pour la société de location de camping-car qui leur offre gracieusement la location ! Nous dégustons des avocats et des pâtes, alors que le véhicule est bien secoué par les rafales ! Pour nous donner courage pour la nuit il nous offre un digestif italien, l’Amaretto. C’est un peu saouls, la faute à l’Altitude, que nous devons retourner à contre cœur dans la tente et vite nous emmitoufler dans nos duvets pour se protéger du froid. Malgré la protection offerte par l’abri, le vent secoue la tente, la nuit sera bruyante…

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Mercredi 8 Juin : Salar de Agua Caliente
Distance : 12 km

Coordonnées GPS bivouac : S 23.924886 W 67.662048

Finalement avec nos supers sacs de couchage Valandré (on les aime ceux-là), nous n’avons pas eu froid. Dehors, l’eau des gourdes a commencé à geler et le thermomètre indique -3°C. Pendant le petit déjeuner, nous étudions la carte.

Nous partons vers le Paso Sico et le prochain « refuge » dont nous avons connaissance : une mine, normalement habitée par un couple. Après plus d’une heure, nous avons difficilement parcourus six kilomètres, alors que nous avons le vent dans le dos… Fabio peine à pédaler et avance lentement, depuis San Pedro son manque d’énergie le fait grincer des dents. Nous faisons le compte des rations de nourriture qu’il nous reste. Avec un tel vent, la route au retour sera un calvaire et nous serons encore plus lents !

Comment envisager de faire les mêmes étapes avec le vent de face ?! Nous avons trois rations de nourriture, alors qu’il nous en faudrait au moins cinq ! Nous avons merdé complet à Socaire en faisant les courses ! La faute aux beaux yeux d’Elisa ??? Demi-tour direction le même abri que la veille que nous atteignons à 11 heures du matin. Le vent souffle déjà très fort et ce n’est pas envisageable de se lancer maintenant en direction de Socaire (face au vent).

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Pour s’occuper, Fabio photographie les Guanacos et les oiseaux du Salar, pendant que Julien transporte des cailloux pour se réchauffer et améliorer le mur de protection de notre abri !

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Un peu de lecture, et la soirée arrive vite, il fait nuit à 18h30 ici. Nous sommes donc couchés à 19h15 après un dîner glacial à avoir attendu pendant 30 minutes que l’eau des pâtes veuille bien bouillir ! Pas de camping-car ce soir, nous nous sentons vraiment seuls au monde !

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Jeudi 9 Juin : Salar de Agua Caliente – Socaire
Distance : 66 km

Coordonnées GPS bivouac : S 23.589900 W 67.890636

Le réveil sonne à cinq heure, ouch ! Nous souhaitons partir avant que le vent se lève, comme en Terre de Feu, quelques mois auparavant. Il fait encore nuit noire. Nous avalons une partie du poridge préparé la veille, et qui heureusement n’a pas gelé pendant la nuit !

A sept heure nous sommes sur les vélos, le vent est alors très faible. Nous reprenons le rythme des jours précédents. Julien grimpe à vitesse minimale alors que Fabio toujours en petite forme doit être régulièrement attendu. L’attendre environ quinze minutes toutes les heures donne rapidement froid à Julien et oblige de tenter de trouver des trous à l’abri de la petite brise glaciale qui souffle ici au-dessus des 3900 mètres. Cette situation n’est agréable ni pour l’un ni pour l’autre. Surtout nous avons tous les deux conscience qu’entamer le Sud Lipez (Bolivie) dans ces conditions sera impossible.

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Près du col à 4100 mètres, Julien découvre un lieu de bivouac d’urgence, un peu protégé par une mini colline en terre (S 23.896455 W 67.815363). Plus tard, nous croisons un paquet de cyclistes ! En premier l’Américain croisé Dimanche à Toconao, il a la caisse celui-là ! Ensuite trois Allemands en route pour les jeux Olympiques de Rio (www.trioforrio.com). Pour finir un Australien tout « stone » qui se dirige vers Salta ! Julien est content que nous ayons amélioré l’abri au Salar, les renforts seront utilisés le soir même !

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Nous arrivons à Socaire en milieu d’après-midi. Devant la cantine à l’entrée de la ville, deux pick-up sont garés. Nous avons décidé de rentrer à San Pedro au plus vite pour que Fabio puisse consulter un médecin. De plus les longues lignes droites le long du Salar sont peu intéressantes. En discutant avec le chauffeur d’un des véhicules, le rendez-vous est pris pour le lendemain onze heures pour aller à San Pedro.

Après le déjeuner traditionnel, nous retrouvons Elisa, la cuisinière aux beaux yeux de la cocineria de Danilo. Nous devons patienter jusqu’à 17 heures, que le patron rentre à la maison pour nous donner l’autorisation de dormir dans la même pièce poussiéreuse utilisée deux jours auparavant. En attendant, Elisa semble avoir besoin de parler et Julien, vaillant, se lance dans la discussion une bonne demi-heure (Fabio ronflant sur un des bancs du jardin d’enfants) Bel exercice d’Espagnol ! Elle est originaire du Pérou, ses cinq enfants vivent toujours là-bas. Elle est ici seulement pour le travail, et pour une durée très limitée. D’ici deux semaines elle retournera à Arica. La discussion est variée : religion, végétarisme, et famille !

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A 17 heures pétante, Danilo qui s’est transformé à l’occasion en chauffeur d’ambulance arrive et est bien surpris de nous revoir ! Il n’avait pas compris que nous avions prévu de faire un aller-retour. Julien lui explique que c’est la première fois sur ce voyage que nous passons deux fois au même endroit. Il nous accueille comme la première fois. Nous serons conviés au dîner toujours en compagnie des ouvriers locaux. La flûte de pan résonne jusqu’à tard dans la soirée.

Vendredi 10 Juin : Socaire – San Pedro de Atacama (en stop)

En plein milieu de nuit nous sommes réveillés par les léchouilles d’un des deux Berger Allemand qui avait fait la route avec nous. Apparemment il est bien rentré et nous a retrouvé pour notre plus grand plaisir… Nous voilà ravis !

Le petit déjeuner avalé, et ayant salué Elisa, nous nous mettons en quête du pick-up rouge de Lincoyén, notre chauffeur ! Après une séance de ping-pong entre les diverses auberges et chantiers, nous chargeons les vélos et peu de temps après nous voici déjà à San Pedro ! Les Chiliens roulent au moins aussi vite que les Argentins ! A cent soixante kilomètres à l’heure en plein milieu des deux voies, la distance nécessitant deux jours à vélo est parcourue en quarante minutes, un record…

Dès notre arrivée, on reprend nos marques à l’auberge Juriques. Fabio file au centre médical. Diagnostic, une inflammation des amygdales. D’après le docteur cela devrait se régler en trois jours. Affaire à suivre, donc !

3 Comments

  1. Les photos sont sublissimes !!!!! Merci de les avoir partagées avec nous pauvres Européens restés à la maison.
    Nous souhaitons que Fabio se remettent rapidement.
    Bisous à tous
    Mimine et Chachat

  2. Well done men.
    C est bon de voir que vous vous éclatez, il en est de même pour ma gueule en Équateur, vous verrez ça vaut le détour et surtout ne loupez pas le Peru, la route de great divide Peru est énorme… toute la topo sur Andesbybike.com
    Bisous à tous les deux à bientot

  3. Simplement SUPERBE ( les photos, les commentaires….) BRAVO
    Bon rétablissement à Fabio.
    Toujours impatient de voir la suite !!!!!
    BIZ

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